Quel est le point commun entre Python, Javascript, C, l’argot, la rhétorique et le sublime ? Rien, en apparence. Pourtant, ce sont tous des systèmes sémiotiques. Autrement dit, des langages différents ayant chacun leur structure, leur syntaxe, leur vocabulaire et leur linguistique. Les langues humaines, de même que les langages de programmation, sont des univers linguistiques où tout se tient et dont le sens est négociable, reposant sur manière intellectuelle de concevoir commune. Développeur web, un métier de lettres ? La linguistique et l’informatique sont-elles faites pour s’entendre ?
Construction des programmes et programmes de construction
Qu’est-ce que le langage ? Une façon de penser, qui sert ensuite à écrire, à argumenter et à développer des idées. Qu’est-ce que le langage en informatique ? Une façon de concevoir, qui sert ensuite à coder, à programmer des logiciels à et formuler des algorithmes à destination d’Internet. D’ailleurs, chaque langage de programmation supporte un ou plusieurs styles de programmation (appelés paradigmes), de même, chaque langage possède plusieurs registres (familier, soutenu, courant, sublime). Impératif, déclaratif, fonctionnel, logique, orienté objet, concurrent, visuel, événementiel, et basé web sont des paradigmes de programmation.
C’est dans les années 1950 que Noam Chomsky, alors enseignant au Massachusetts Institute of Technology (MIT) redéfinit le domaine de la linguistique en fondant la grammaire générative, une théorie basée sur le pouvoir de générations des langages. D’après lui, en se basant sur un jeu réduit de règles de grammaire et un ensemble fini de termes, les humains peuvent produire un nombre infini de phrases.
Le développement de la grammaire générative a définitivement changé approche générale de l’architecture de la faculté du langage humain.
Aujourd’hui, les étudiants et chercheurs en linguistiques sont familiers des théories et recherches de Noam Chomsky et ses successeurs, notamment en ce qui concerne l’étude de la syntaxe et de la sémantique. Sans aller jusqu’à affirmer que tous les linguistes et étudiants en lettre sont des développeurs qui s’ignorent, du fait la parenté entre les deux disciplines, ils peuvent présenter des dispositions, voire des aptitudes à programmer et à coder. Si la notation d’un programme est généralement plus mathématique que littéraire, la réflexion en amont se rapproche énormément de la linguistique. On retrouve la même façon de penser, de structurer les outils pour s’en servir et construire un programme ou un texte ayant un but défini. L’objectif d’un discours est de convaincre, c’est l’art de la rhétorique. L’objectif d’un programme est de définir les manipulations à effectuer par un ordinateur dans un logiciel. Dans les deux cas, il s’agit d’un moyen de communication, comprenant une volonté d’exécution, de mise en oeuvre ou en application
Par tradition, on a tendance à opposer les lettres et les sciences. Conséquemment, le clivage littérature / informatique est encore très présent dans les mentalités. Pourtant, la tendance s’inverse progressivement. Actuellement, on constate que les études et cursus de lettres et plus largement de sciences humaines intéressent de plus en plus les entreprises de la communication et du digital, qui recrutent à tour de bras des profils de plus en plus variés. Dans les nouveaux (et les anciens) métiers de l’informatique (dépannage informatique…), ce n’est pas tellement l’ampleur des connaissances et les certitudes qui comptent, mais l’intuition, la capacité à remettre quelque chose en question et à l’analyser. Des compétences très développées aux cours des formations littéraires et méta-littéraires.